À moins dʼavoir passé les dernières semaines dans une grotte, vous avez forcément entendu parler des “#geonpi” : ces entrepreneurs mécontents qui grognent sur les réseaux sociaux contre le projet de loi de finances 2013. Un aspect de la loi vise à aligner la fiscalité du capital sur la fiscalité du travail, ce qui déplaît à ces “Pigeons” (vous l’aurez comprit, la magie du verlan donne ce nom fabuleux :p).
Qu’est-ce qui cause cette colère ?
La raison pour laquelle les entrepreneurs réagissent, c’est que, dans la pratique, la nouvelle fiscalité pourrait bien faire de la création de start-up en France tout à fait indéfendable.
Comme dans n’importe quel autre pays, les entrepreneurs français prennent des risques. Ils créent de nouvelles richesses, ils créent des emplois. Ils atteignent généralement les 35 heures le mardi et mettent souvent de leurs propres économies dans l’entreprise.
Pourtant, en France, les entrepreneurs obtiennent très peu de reconnaissance. Cela peut être difficile à comprendre pour quelqu’un qui est plus habitué à Silicon Valley, où la vie d’entrepreneur est une bonne chose et est beaucoup plus valorisée. Mais en France, «entrepreneur» est presque un gros mot. Dans l’esprit du grand public, les entrepreneurs et des dirigeants d’entreprises avides gagnent des millions par an sont une seule et même chose.
En réalité, les entrepreneurs en France gagnent très peu, sinon rien, juste comme dans n’importe quel autre pays. Pas de salaire minimum. Pas de protection de l’emploi. Le entrepreneurs, contrairement aux autres travailleurs en France, n’ont pratiquement aucune prestation de retraite, et certainement pas de «parachute doré». Plus précisément, ils ne reçoivent rien de l’État en cas d’échec.
Le nouveau régime
Mais alors, qu’est-ce qui a changé ? Ce qui dérange les entrepreneurs français avec cette nouvelle loi de finance, c’est de savoir ce qu’il adviendrait d’eux dans le cas où ils réussiraient. En France, comme dans n’importe quel autre pays, les entrepreneurs échouent neuf fois sur dix, et ils sont préparés à cela. Mais qu’advient-il si ils réussissent ? C’est là le problème.
La nouvelle loi est censée doubler la taxation sur les plus-values que vous pourriez tirer d’un investissement réussi dans une petite start-up, de 30% à 60%. Oui, vous avez bien lu, soixante.
Si, au bout de 5 à 10 ans d’une vie inconfortable, un entrepreneur chanceux arrive à une quelconque forme de succès, ce qui signifie au passage qu’il aura créé une société durable et à priori plusieurs emplois, il perdra immédiatement un peu plus de 60% au profit de l’État.
Mais ne vous inquiétez pas, il y a mieux. L’État arrive à recueillir quelques pourcents supplémentaires ici et là : 1% à 2% par an sur l’ISF, une autre belle invention française et enfin 45% de “ce qui reste” va de nouveau aller à l’État lorsque l’entrepreneur, épuisé, meurt.
Qu’ont-ils obtenu ?
C’est ce qu’a voulu faire croire le gouvernement. Pierre Moscovici a dit qu’il était prêt à entendre les pigeons et à trouver des solutions. Après une réunion à Bercy, le ministre a proposé des ajustements sur le texte, notamment sur la part du capital à réinvestir pour obtenir une exonération. Une défaite pour le gouvernement ? Pas si sur, la plupart des mesures restant au programme.
Alors, toujours envie de créer une entreprise ?
Pour conclure, voici ce qu’on dit de nous à l’étranger : “French PM goes full-retard and tries to tax entrepreneurs out of existence. Insane” [Le Premier-Ministre français devient débile et tente de tuer les entrepreneurs par les taxes. Insensé].
Source : Grenouille Bouillie